Le yoga du som­meil et du rêve

Le Tantrisme tibétain reconnaît l’utilité des rêves lucides comme outil pour accéder à l’Éveil. Grâce à une pratique assidue, le yogi peut non seulement prendre conscience de la similarité entre la vie éveillée et celle des rêves, mais également commencer à manipuler ces derniers.

“Nous passons le tiers de notre vie à dormir. Quoi que nous fassions, que nos activités soient vertueuses ou non, que nous soyons saints ou meurtriers, moines ou libertins, chaque jour finit de même. Nous fermons les yeux et nous nous dissolvons dans l’obscurité.” Ainsi commence l’ouvrage que le moine tibétien Tenzin Wangyal Rinpoché a consacré en 1998 au yoga tibétain du rêve et du sommeil, une ancienne tradition du bouddhisme tébitain Bön dans laquelle les moines s’entraînent à la pratique des rêves lucides. 

Si en Occident nous connaissons surtout les pratiques posturales (asana) et respiratoires (prana) du yoga, celui-ci comporte en réalité de nombreuses autres pratiques, toutes considérées comme des formes diverses de méditation. Le Tantrisme tibétain reconnaît notamment une certaine utilité au rêve – qui se dit “milam”, signifiant “la voie de la manifestation” – en tant qu’outil d’accès à l’Éveil et à la Libération. 

Pour pratiquer le yoga du rêve, il s’agit tout d’abord de devenir lucide, ce qui passe par une pratique assidue afin que dans le songe nous soyons toujours conscient de rêver. Cette exacerbation de notre conscience doit permettre de ne plus se laisser emporter par nos pensées et nos émotions et donc de ne plus subir mais de rester présent, libre et apaisé. Il est ensuite nécessaire que le rêveur dépasse toutes les peurs auxquelles il est confronté dans son sommeil, en comprenant qu’il ne fait face qu’à un miroir, une simple projection de son propre esprit, et que rien ne peut lui faire de mal puisqu’il est lui-même à l’origine de tout. 

Une fois conscient de l’illusion du rêve et libéré de toute crainte, le yogi doit prendre conscience de la similitude entre la vie et les rêves : dans la journée nous sommes engagés dans le même processus de production onirique, mais nous projetons cette activité mentale sur le monde et pensons que nos expériences sont “réelles” et extérieures à notre propre esprit. Elles ne le sont pas. La vie éveillée n’est en cela pas différente de la vie assoupie. Le cerveau ne fait d’ailleurs pas la différence entre les émotions ressenties dans le sommeil et celles de la journée. Les expériences que nous avons en songe ne sont donc pas plus irréelles que celles de notre vie à l’état de veille. Seuls nos sens se retirent dans le sommeil, n’influençant plus la conscience qui réside alors dans sa base.

Le yogi pourra ensuite manipuler ses rêves – tant les objets, couleurs, lumière, images, sons et odeurs que son propre corps -, en exclure l’influence des émotions négatives, et méditer sur l’image des divinités, perçues comme des portes vers l’illumination. Loin d’être réservée aux moines et yogi confirmés, cette pratique peut être utilisée par tous afin de comprendre la nature de l’état de rêve et, par cette compréhension, en tirer des bénéfices d’ordre spirituels ou psychologiques.

En ramenant de l’attention dans une partie négligée de notre expérience qui occupe pourtant un tiers de notre existence, le yoga du rêve permet de profiter au maximum de notre vie humaine en développant une conscience accrue de chaque instant, éveillé comme endormi.

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